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Pourquoi les Français vont-ils moins souvent au cinéma ?

Par 24 mai 2022Aucun commentaire

Lors de la 75e édition de Festival de Cannes, le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) a dévoilé une étude (23/05) dont l’objectif est double : identifier les raisons de l’atonie persistante de la fréquentation des salles et mettre à jour les leviers possibles d’une reconquête du public.

Les chiffres du CNC sont plus inquiétants que ceux donnés par l’AFCAE (étude) car plus complets. L’Association française des cinémas Art & Essai, en effet, ne documente que l’un des cinq facteurs identifiés par le CNC comme responsables de la baisse de fréquentation des salles de cinéma : la préférence donnée à d’autres supports que l’écran en salle, c’est-à-dire le visionnage en ligne.

Fréquentation « en berne ». Le constat est sans appel : mesurée après la réouverture post-Covid des salles, la fréquentation en 2021 a baissé de 55%. Et les chiffres des premiers mois de 2022 n’enregistrent qu’une timide quoique réelle reprise, avec -42% de fréquentation pour janvier 2022 par rapport au même mois en 2019, -41% en février, -30% en mars et -23% pour le mois d’avril – premier mois complet sans restriction sanitaire.

D’un point de vue déclaratif, au moment de l’étude, 48% des Français déclarent être revenus moins souvent ou plus du tout au cinéma depuis la réouverture des salles le 19 mai 2021. A noter enfin que les jeunes restent plus assidus alors qu’une partie des 25-59 ans « n’a pas renoué avec ses habitudes de fréquentation d’avant la crise sanitaire ».

Les raisons d’une désaffection. L’étude du CNC donne cinq réponses, mêlant facteurs structurels et conjoncturels, à sa question-titre « Pourquoi les Français vont-ils moins souvent au cinéma ? »

  • parce qu’ils ont perdu l’habitude d’aller au cinéma (38% des réponses),
  • parce les billets sont trop chers (36%),
  • parce que le maintien de l’obligation du masque constituait une gêne (33%),
  • parce qu’ils préfèrent regarder les films sur d’autre supports (26%),
  • parce que les films proposés manquent d’intérêt (23%).

Les questions de prix (évoquée plus massivement par les 35-59 ans) et de masque sont évidemment conjoncturelles. Le masque appartient (momentanément ?) au passé et des mesures politiques ou commerciales peuvent efficacement influer à la baisse sur le coût d’entrée.

La perte de l’habitude de la sortie en salle est en revanche plus inquiétante, car potentiellement plus durable, d’autant qu’elle est à mettre en relation avec la découverte heureuse d’autres manières de voir des films. A noter que la préférence pour d’autres supports prévaut chez les 15-34 ans (36%) alors que la perte de l’habitude de la sortie au cinéma concerne davantage les 60 ans et plus (51%). Ce qui esquisse le scénario troublant où, jeune on opte pour les écrans privés, adulte on hésite car c’est cher et senior on a d’autant plus perdu l’habitude d’aller au cinéma en salle que cette pratique s’était déjà amenuisée dans ses années précédentes…

Enfin, le manque d’intérêt pour la production cinématographique actuelle relève de facteurs autant esthétiques qu’économiques et pose la question du soutien à la diversité de la création et de la résistance à l’emprise croissante des grandes productions. Ou serait-ce l’inverse ? Car le CNC confirme l’attractivité des blockbusters et souligne que les 15-24 ans sont attirés par les films américains, de préférence d’aventures ou d’horreur…

Leviers d’action pour favoriser le retour du public. Les raisons de la désaffection des salles indiquent déjà plusieurs pistes politiques pour l’endiguer, notamment des politiques tarifaires dont peuvent notamment s’emparer les collectivités, par exemple via des dispositifs de passes culturels, et des politiques de régulation qui, elles, relèvent davantage de l’Etat et/ou de l’Union européenne.

Pour sa part, l’étude estime que l’analyse des motivations des spectateurs qui ont renoué avec l’habitude de fréquenter la salle de cinéma « est riche en enseignements sur les leviers d’action dont disposent les acteurs de la filière et les pouvoirs publics ».

  • La plus forte des motivations (51%) est logiquement celle du goût pour le cinéma ; ici, la politique de l’éducation à l’image peut être mobilisée pour accroître l’envie de films.
  • Suit la qualité des projections en salle (37%) et le plaisir d’être ensemble (36%) ; sur ces deux motivations, c’est sur une attention accrue au maintien du tissu de diffusion du cinéma qu’il est possible de se mobiliser, notamment pour préserver et améliorer le réseau territorial des salles municipales. L’étude note d’ailleurs que la baisse de la fréquentation s’avère moins forte chez les indépendants (-28%) et les salles Art & Essai (-49%) que pour les « circuits » (-64%).

Quoi qu’il en soit, la France demeure le premier pays européen en termes de fréquentation. « L’atonie constatée depuis la réouverture des salles n’est pas une fatalité ! Le cinéma ne disparaîtra jamais des salles ! », déclare, confiante, Dominique Boutonnat, président du CNC.


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